Certains de ces textes sont également disponibles sur le site https://www.leconteur.fr/. N’hésitez pas à vous y rendre, les textes de qualité sont nombreux, la communauté active, ouverte d’esprit et bienveillante et la censure absente, ce qui tranche avec d’autres sites de publication (spéciale dédicace à DPP).

vendredi 26 juillet 2024

Clémence en vacances

NDA: Souvenir d'une vie évitée de peu je pense, d'une angoisse toujours présente, de moments passés ou présents auprès de ceux qui imprègnent nos rues de toute leur humanité et de ceux qui les regardent avec mépris.

 Clémence en vacances

 

Il a 15 ou 20 ans, 30 ans, 50 ou plus,

Son âge s'est fixé aux premiers pas dehors,

Un marnage perdu, coincé à marée basse ,

Une houle négligée qui n'atteint plus vive-eau.

 

Il ne se lève jamais que pour battre en retraite,

D'un été acharné, d'un soleil harceleur,

Brasero diabolique qui lui brule les yeux et lui tanne la peau.

 

Embarquant avec lui un matelas défoncé,

Un carton faisandé par des fluides amers,

Un vieux caddy rouillé pour lui tenir la main,

Il s'évade vers la mer profitant de l'hiver,

A distance des touristes et des passants brutaux.

 

Vacarme, chaleur et froid,

Moiteur, crasse et effluves,

Un monde de sensation nourri son quotidien,

Un gavage putride, primitif châtiment,

A jamais exigé pour apaiser sa faim.

 

Car il se sent coupable, et peut être l'est-il,

D'une faute oubliée, certainement pardonnée,

D'une bavure factice, d'un méfait romanesque,

Un péché minuscule qui ne s'abroge jamais,

Et qu'aucune pénitence n'arrive à effacer.

 

Parfois espère-t-il, abaissant sa valeur,

Au plus bas que personne ne peut le supposer,

D'une OPA stérile, se racheter enfin,

A ses yeux tout du moins, à défaut de tout autre.

 

Et c'est donc dans l'alcool, dieu de l'absolution,

Absinthe spirituelle qui gracie sobrement,

Qu'il se projette enfin, s'expulse de sa carcasse,

Loin des foyers luxueux et des cachots dorés,

Qu'on lui prête intention de se plaire à squatter.

 

Encore plus morts que morts,

Ils n'ont même plus envie qu'on leur dise je t'aime.

Et pourtant il le faut.

Vous, mes frères, mes enfants, mes pairs,

Je vous aime.

 

Titre volé à la regrettée Anne Sylvestre



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire